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DEVS : Une expérience de Science-Fiction unique

  • Agathe
  • 20 avr. 2020
  • 8 min de lecture

Par où commencer...


Il est difficile de mettre des mots sur l'expérience que j'ai pu vivre devant DEVS sans trop en dévoiler. Afin de vous laisser la surprise la plus totale, je ferai donc de mon mieux.

Alors voilà : Etrange, originale, envoutante, mystérieuse, mystique, déconcertante, captivante, singulière, inquiétante, hypnotisante. Cette série est tout ça à la fois.


Le pitch de base de DEVS est assez simple : Sergei, un employé modèle de la société technologique Amaya, reçoit la consécration ultime : son patron, Forest, lui propose de travailler pour leur division secrète appelée « Devs ». Mais à l'issue de sa première journée à ce nouveau poste, il est retrouvé mort. Tout porte à croire qu'il s'est suicidé. Réfutant totalement cette thèse, sa petite amie Lily décide de mener l'enquête...


Ecrite et réalisée par Alex Garland, à qui l'on doit les films Ex-Machina et Annihilation, il est aussi le scénariste derrière le célèbre 28 jours plus tard de Danny Boyle.

Véritable passionné de Science-Fiction, il s'essaie à un nouveau format de narration en nous proposant aujourd'hui cette sublime série dystopique de 8 épisodes, à découvrir sur Canal+.



DEVS, un programme technologique énigmatique


Rien ne semblait indiquer sur le papier que j'allais me plonger dans de la pure Science-Fiction. Et pourtant, dès le premier épisode, on comprend vite que nous ne sommes pas tombés dans n'importe quelle entreprise de haute technologie.


Le programme Devs ne se tient pas dans les mêmes locaux que le reste de l'activité de la société. Pour s'y rendre, il faut marcher longtemps et profondément dans la forêt.

Et là, au milieu d'une clairière, on découvre un bâtiment à la forme étrange, autour duquel sont dressés des poteaux d'une matière non identifiée.



Pour pouvoir accéder au laboratoire, il faut ensuite entrer dans un sas en verre qui avance en lévitation au-dessus du vide grâce au magnétisme. "Plutôt stylé" comme dirait Forest.


Qu'est ce que Devs ? Pourquoi ont-ils construit une telle forteresse ?

Qu'est ce qui s'y fait ? Quel est le but de leur travail ?



Si vous êtes impatients et que vous aimez tout comprendre tout de suite : passez votre chemin. Car DEVS ne vous révèlera pas aisément les réponses à vos questions. Mais vous n'êtes pas les seuls ! Les personnages n'en savent pas beaucoup plus que vous...


Quand Sergei est enfin installé à son poste, il n'a en effet aucune idée d'en quoi son travail va consister. Pour Forest, son boss, pas question de lui expliquer ; il devra résoudre cette énigme par lui-même, en décryptant le code inscrit sur l'écran de son ordinateur.

Ce qu'il fera. Et tout va alors basculer...



Pourquoi Sergei est-il retrouvé mort un jour après son entrée dans la division de Devs ? Comment cela a-t-il bien pu arriver ? Est-ce réellement un suicide ? Ce sont tous ces mystères que va tenter de résoudre Lily, sa petite-amie.


DEVS est donc à l'image de son programme secret analogue : énigmatique et insaisissable.


Une atmosphère empreinte d'une inquiétante étrangeté


Ce qui se dégage de cette série, les sensations et émotions qu'elles procurent, joue un rôle aussi important que l'histoire en elle-même. Tout semble avoir été convoqué pour créer une parfaite inquiétante étrangeté, qui ne vous quittera pas durant ces 8 épisodes.



Cette atmosphère bizarre, sorte d'épée de Damoclès qui plane au-dessus des personnages et du récit, est unique. On ne sait pas trop quand cette menace latente s'abattra sur eux, ni de quelle manière, mais on la sent toujours plus les entourer et les envelopper.


L'esthétisme de cette série y est pour beaucoup. La perfection des cadres de Garland et le travail autour de la lumière, qui plonge la série dans un éternel clair-obscur, participent à donner vie à cette atmosphère presque indescriptible tant elle est particulière.



Les sons et la musique de DEVS sont également exceptionnels. Allant de bruits mécaniques à des chants lyriques d'église, de sons stridents et dissonants à des phrases qui tournent en boucle, tel un disque rayé ; l'univers sonore est d'une richesse époustouflante rarement vue/entendue dans une série.


De toutes les séries que j'ai pu visionner, jamais une inquiétante étrangeté n'avait été mise en scène de manière aussi puissante et profonde.


Une série O.V.N.I. qui m'en évoque d'autres


DEVS m'évoque forcément l'inquiétante étrangeté de Twin Peaks, par David Lynch.

Audacieuse, labyrinthique, dense et totalement perchée, ce soap drôlement revisité est une série pionnière et culte dans le registre fantastique.

Mais à contrario de DEVS, son inquiétante étrangeté n'est pas omniprésente. Twin Peaks nous offre en effet des moments de respiration, à travers des scènes d'amourettes adolescentes ultra mièvres qui se placent en totale opposition avec le reste de la série.



The Homecoming (Amazon Prime) a également quelque chose de similaire à DEVS : cette impression de mystère menaçant et sclérosant.

On ne sait pas trop où l'on est, ni en quoi consiste l'activité du centre dans lequel Julia Roberts travaille. Certes on ne sait pas trop ce qui va arriver non plus, mais on devine que ça ne sent pas bon...



Enfin, pour son côté SF pur, on pense aussi à The OA (Netflix). Laboratoires dans lesquels on mène des expériences, des recherches scientifiques et technologiques pour percer à jour les plus grands mystères du monde...

The OA et DEVS se ressemblent également dans leur dimension mystique et philosophique.

Ces séries partagent surtout cette même audace : faire une vraie proposition, quelque chose de nouveau et de différent des (trop) nombreuses séries qui se suivent et se ressemblent.



Des décors futuristes somptueux


Les décors, quant à eux, sont tout bonnement sublimes, un personnage à part entière. Totalement épurés, futuristes et glacials, ils nous transportent dans un autre monde : celui de la science fiction, d'une fresque dystopique puissante et hypnotisante. Et si l'atmosphère n'était pas déjà assez inquiétante, elle peut presque en devenir anxiogène.


Les bâtiments futuristes de la société Amaya, aussi bruts et bétonnés qu'ils soient, sont toujours pensés pour coexister avec la nature. Que ce soit les néons installés autour des arbres, les bâtiments principaux d'Amaya aux grandes baies vitrées ; la société laisse la nature entrer dans ses structures, et le naturel et l'artificiel s'entremêlent.


Il en est de même pour la succursale de Devs, plantée en plein coeur de la forêt : elle offre un lien avec la nature en étant surplombée par un fin bassin d'eau claire.



Et de l'intérieur, elle est encore plus mystérieuse. Son laboratoire cubique doré flotte en lévitation 7 mètres au dessus du vide, et sa lumière vacille telle un phare perdu à l'horizon.



L'autre élément qui nous donne la chair de poule à chacune de ses apparitions, c'est la statue géante d'une enfant qui surplombe la forêt. Comment une simple sculpture, et d'une petite fille qui plus est, peut-elle autant nous désarçonner ? Normalement synonyme d'innocence, de pureté qui ignore tout du mal, symbole de candeur qui ne connait pas encore la (dure) réalité de la vie, c'est pourtant tout l'inverse qu'elle nous évoque.



Cet univers à l'architecture époustouflante et ultra moderne participe à retranscrire intelligemment comment la technologie sera ainsi au coeur de l'intrigue de DEVS.


Des personnages paradoxaux et insaisissables


La sortie de DEVS sur les ondes a été très discrète ; je suis d'ailleurs tombée dessus par hasard. Et je ne me serai jamais lancée dans son binge-watching si je n'avais pas vu que mon cher Nick Offerman faisait partie du casting !

Tellement inoubliable dans son rôle de Ron Swanson dans Parks & Recreation, il a donc piqué ma curiosité de le découvrir jouer dans autre chose. Et je n'ai pas été déçue.


Forest est un personnage hautement énigmatique. A la tête d'une des plus grandes sociétés high-tech au monde, il a pourtant l'apparence d'un Big Lebowski (ou d'un bobo qui n'a pas pris de douche depuis trois semaines). Roulant au volant d'une voiture pourrie et vivant dans une maison modeste, il est loin de profiter de sa fortune. Désintéressé par l'argent donc, pas matérialiste pour un sou, il n'a pas le profil attendu du dirigeant d'une telle entreprise.


Tout ce qui l'intéresse, tout ce qui l'obsède est le fameux et mystérieux projet Devs...

Là sans vraiment l'être, le regard souvent perdu et vide, il semble aussi bienveillant qu'il est menaçant. La seule chose qu'on arrive à déceler chez lui, est qu'il est habité par une infinie mélancolie. Que lui est-il arrivé ? Qui est vraiment Forest ? Quelle est son histoire ? Je vous laisse le découvrir par vous-même.



C'est à travers le regard de Lily, l'héroïne, que l'on plonge dans l'histoire de DEVS.

Elle est le seul personnage auquel le téléspectateur peut se raccrocher et s'identifier. A la différence des autres, Lily ne se cache pas derrière un masque et nous touche d'autant plus par sa sensibilité et sa sincérité sans faille. Portée par un jeu très juste, presque naturaliste, il émane de Lily quelque chose de spécial, à la fois de doux et de familier.


Son interprète, Sonoya Mizuno, a été pour moi une révélation.

Déjà aperçue dans des petits rôles dans La La Land ou la série Maniac, je n'avais pourtant gardé aucun souvenir d'elle. En lui offrant un tel rôle, je pense que Sonoya Mizuno a pu montrer tout son potentiel. Je serai attentive à ses prochains projets.



Un des personnages qui m'a également interpelé et perturbé répond au nom de Katie. Incarnée par Alison Pill, que l'on a pu voir notamment dans Vice, Snowpiercer, Minuit à Paris ou encore Scott Pilgrim, on pourrait la prendre pour une humanoïde.


Insaisissable de par son absence d'expressions ou d'une quelconque manifestation d'émotions, elle est aussi froide et implacable qu'un iceberg.

Bras droit de Forest, et en charge du programme Devs, on se doute néanmoins que derrière ce regard indifférent à tout ce qui l'entoure doit se cacher une tête bien faite, mais également un rôle important au fil des épisodes...



Un récit à la fois mystique et philosophique


DEVS est une oeuvre aux multiples portées.


La technologie étant au coeur du récit, cette histoire évoque donc des questions régulièrement soulevées dans d'autres séries dystopiques. La place de la high-tech dans notre monde, les conséquences de ses avancées, ont en effet déjà été explorées dans Black Mirror, Westworld, Real Humans, ou encore Years and Years.


DEVS nous fait ainsi réfléchir sur notre société, toujours plus portée sur les inventions et découvertes technologiques : l'intelligence artificielle, le big data, l'intrusion de la high-tech dans notre vie privée... Mais cette série est bien plus que ça encore.



DEVS aborde aussi des questions philosophiques ancestrales, présentes dès les premiers temps de l'humanité. Le Bien et le Mal, l'Humanité, les notions de Libre Arbitre et de Déterminisme sont également au coeur de cette série.


Enfin, DEVS est une série à portée mystique, qui interroge les points les plus sensibles et centraux de nos existences : la Vie, la Mort et le Temps, notre grand ennemi.

Mais ce n'est pas tout, cette série évoque aussi ce qui découle de ces grands concepts, ce à quoi nous pensons chaque jour : désirs, regrets, souvenirs, et la fameuse question "Et si ?".



Le mysticisme de DEVS va même encore plus loin, et flirte avec le spirituel. Damnation, Absolution, Repentance, l'Au-Delà... Tous les plus grands mystères de la vie et de l'humanité sont présents à l'appel. Et le mysticisme rime aussi ici avec d'autres sujets chers à The OA : le Monde, l'Univers, les Sciences Quantiques et ses Multivers...


Tous ces sujets chers à la Science-Fiction raviront donc ses amateurs. Et il faut saluer l'époustouflante faculté d'Alex Garland d'aborder autant de points cruciaux et pourtant si différents, sans pour autant s'emmêler les pinceaux ou perdre le public. Car parfois à force de vouloir parler de tout, on ne parle de rien, et c'est heureusement tout le contraire ici.



DEVS est donc une série à la fois belle et étrange, qui mérite réellement d'être découverte.


Terriblement captivante grâce à la richesse de son récit et ces multiples rebondissements, c'est avant tout un chef-d'oeuvre d'une grande profondeur.


Et même si elle prend son temps pour se dévoiler, ce n'est pas une série obscure, incompréhensible ou ennuyeuse, où vous risqueriez de vous perdre.

J'ai parfois du mal à regarder une série dont je ne comprends pas tout : celle-ci a la grande force de pas vous perdre en chemin et de vous faire accepter avec délectation de ne pas avoir tout de suite tous les éléments en main pour la déchiffrer. C'est ainsi avec un grand plaisir que je me suis laissée portée dans son histoire et son univers si particuliers.


Même si elle est baignée d'une inquiétante étrangeté, ce n'est pas une série qui va vous stresser, vous angoisser ou vous rendre mal, bien au contraire. Malgré tout ce qui s'y passe et les grands sujets abordés, DEVS vous laisse dans un état à la fois doux et mélancolique.



DEVS est une expérience sensorielle et émotionnelle absolument unique, et je pèse mes mots. Quand je fais en effet le bilan de toutes mes découvertes sérielles des dix dernières années, j'ai rarement (pour ne pas dire jamais) vécu ça auparavant.


Au plaisir de pouvoir en discuter avec vous un jour si vous la regardez.

J'espère surtout avoir réussi à vous donner envie de la découvrir, malgré de nombreux sujets non abordés pour ne pas vous spoiler !


Et pour finir : Merci Alex Garland.

 
 
 

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